Critique : La Bête : vertige magnifique et cauchemardesque
CRITIQUE ANCIENS FILMS
Thomas Cordet
4/11/20252 min read
Il y a tellement de choses à dire sur La Bête… Alors quand on ne sait pas par où commencer, il vaut mieux commencer par la fin.
Bertrand Bonello est notre David Lynch français, et La Bête est son Inland Empire. Un puzzle psychologique aux mille détails sur un amour impossible à travers les époques, les univers parallèles et les vies antérieures. Si le monde parfait était une IA, si nos émotions étaient nos failles, seuls 0,7% d'entre nous se battraient pour avoir une chance de souffrir encore un peu. Plongeons dans cette infime part d’humanité et voyageons dans l’espace et le temps avec Léa Seydoux et George MacKay.
Dans La Bête, il y a des costumes, des décors, des poupées, des flammes, du désir, des regards, une profonde paranoïa, une inquiétude latente, du malaise, de la peur, des changements de format, des musiques, des rêves, des incohérences, des jump cuts (beaucoup), des gros plans (énormément), des regards caméra, des sauts dans le temps, des bugs, des vlogs (oui), et surtout : pas de générique, mais à la place... Un QR code ? Et oui, évidemment ! Comment clôturer une fresque de 2h30 sur un monde dystopique aseptisé à la mise en scène expérimentale autrement qu’avec un QR code ? Scannez-le et regardez-le ce générique, une petite surprise s'y cache.
Bertrand Bonello est un véritable artiste. La liberté artistique totale qui émane de La Bête n'empêche pas le film de rester lisible et cohérent, ce qui le rend facile à suivre tout en étant complexe et abstrait. Mais s'il parvient à nous emmener sans peine pendant plus de deux heures, c’est surtout grâce à sa plus grande force, outre son montage et sa mise en scène : Léa Seydoux, évidemment. Ce rôle aux multiples facettes lui va tellement bien, elle porte le film sur ses seules épaules, sublimée par la vision excentrique et élégante du réalisateur. Son jeu habituellement sobre et ténébreux correspond parfaitement au ton du film, à l’image d’Isabelle Huppert dans Sidonie au Japon : ces actrices méritent des films faits sur mesure pour elles, au lieu d’être propulsées dans des productions où leur présence n’apporte aucune valeur ajoutée.
Voilà. Pour faire comme le film, j'ai inversé l'ordre de mes paragraphes, mais ça n'a pas vraiment de sens puisque l'important est au milieu. J'aimerais me replonger dans cet univers, ou plutôt dans le moment qu'il m'a offert. Un moment à part, indéfinissable, mais tellement agréable.
Thomas Cordet





