Critique : CLOUD de Kiyoshi Kurosawa, atlas de la haine

CRITIQUES COURTES

Baptiste Brocvielle

6/3/20251 min read

Si Kaïro (2001) personnifiait la menace d’un Internet encore naissant sous le prisme de l’horreur surréaliste, Cloud se concentre sur des dangers contemporains : l’anonymat sur internet, le mimétisme numérique et l’escalade rapide de la violence sur les réseaux

Encore et toujours, Kiyoshi Kurosawa recherche à travers son cinéma l’origine du mal.
Elle est ici intimement liée à un capitalisme qui aveugle et enferme les personnages dans leur cupidité. La société japonaise est, une fois de plus, dépeinte comme profondément malade et peuplée de victimes n’attendant que l’étincelle qui fera exploser leur violence réprimée. C’est un revendeur en ligne, Ryosuke, qui cristallise cette jalousie et cette haine, devenant la cible d’une vengeance collective orchestrée par un groupe d’internautes. Pas de place pour le crime passionnel cependant : il faut « considérer ça comme un jeu », une simple piqûre d’adrénaline. L’acte de tuer est vidée de sa dimension terrible. Une terreur calme subsiste.

Cloud est ainsi bel et bien un film de Kurosawa, illustrant ses obsessions par une mise en scène froide et chirurgicale. Il fait cependant le choix de délaisser le genre horrifique - dont sa maîtrise n’est plus à prouver - pour basculer vers le thriller d’action. Il souffre dès lors de la comparaison avec Chime, sorti la semaine précédente : plus explicatif, moins subtil et symbolique que le moyen métrage. En bref, il échoue à happer.
Difficile néanmoins de reprocher au cinéaste son exploration des genres pour faire passer ses messages qui, eux, demeurent toujours aussi pertinents.


Baptiste Brocvielle